L’apnée du sommeil est un syndrome respiratoire nocturne fréquent, mais souvent sous-estimé. Elle se caractérise par des pauses répétées de la respiration pendant le sommeil, provoquant une baisse du taux d’oxygène dans le sang. À long terme, ces apnées obstructives peuvent avoir des conséquences sérieuses sur la santé cardiovasculaire, le métabolisme et la qualité de vie. Mais cette maladie peut-elle réellement être mortelle ? Découvrons ce que disent les études scientifiques et comment prévenir les complications graves.
Peut-on vraiment mourir de l’apnée du sommeil ?
Mortalité directe ou indirecte : faire la distinction
L’apnée du sommeil n’entraîne pas systématiquement la mort pendant la nuit, mais ses conséquences physiologiques peuvent, à terme, s’avérer létales. Pour bien comprendre cette réalité, il est important de différencier les décès directement liés aux épisodes d’apnée de ceux qui résultent de ses complications indirectes.
La mortalité directe : une issue rare mais possible
Dans de très rares cas, un épisode d’apnée sévère peut provoquer une chute critique du taux d’oxygène dans le sang (hypoxémie). Le cœur et le cerveau, privés d’oxygène, peuvent alors entrer en détresse aiguë. Si elle est prolongée, elle peut entraîner une :
- Arythmie cardiaque fatale ;
- Bradycardie extrême ;
- Désaturation sévère du sang qui conduit à un arrêt cardiorespiratoire.
Ces cas restent exceptionnels, car la plupart des patients souffrants de ce syndrome se réveillent inconsciemment au moment où la respiration s’interrompt trop longtemps. Toutefois, chez des sujets fragiles (en surpoids, en situation d’obésité ou âgés, insuffisance respiratoire) ce mécanisme de “réveil de survie” peut ne pas suffire. C’est là que la mortalité directe devient une possibilité.
La mortalité indirecte : la véritable menace
Plus souvent, c’est l’effet cumulatif de l’apnée du sommeil qui s’avère dangereux. Les micro-éveils répétés, le stress oxydatif et l’inflammation chronique qu’elle provoque perturbent profondément l’équilibre cardiovasculaire et métabolique, favorisant au long terme :
- Hypertension artérielle résistante ;
- Maladies coronariennes ;
- Accidents vasculaires cérébraux (AVC) ;
- Diabète de type 2.
L’apnée du sommeil accroît la somnolence en journée, augmentant le risque d’accidents de la route ou du travail, qui peuvent, eux aussi, avoir une issue mortelle.
Ce que disent les études scientifiques récentes
Les recherches récentes confirment que l’apnée du sommeil peut vraiment augmenter le risque de décès, surtout quand elle n’est pas prise en charge.
Une grande étude publiée dans la revue Sleep Medicine Reviews a analysé plus de 42 000 personnes souffrant d’apnées obstructives. Résultat : celles qui souffrent d’apnée du sommeil avaient près de deux fois plus de risques de mourir prématurément, toutes causes confondues. Et ce danger était encore plus marqué pour les décès d’origine cardiaque ou vasculaire. [1]
Autrement dit, les arrêts respiratoires répétés pendant la nuit ne tuent pas directement, mais ils provoquent une série de réactions en chaîne : le manque d’oxygène fait grimper la tension, fatigue le cœur, dérègle le métabolisme et favorise les accidents vasculaires.
L’étude rappelle donc que l’apnée du sommeil est une maladie chronique sérieuse, mais dont les conséquences sont évitables si elle est traitée à temps par médecin spécialiste des troubles du sommeil.
Pourquoi l’apnée du sommeil peut devenir dangereuse?
Les effets du manque d’oxygène sur le cœur et le cerveau
À chaque pause respiratoire, l’apnée du sommeil provoque une diminution temporaire du taux d’oxygène dans le sang, appelée hypoxie intermittente.
Le cerveau perçoit ce manque d’air comme une menace et active automatiquement le système nerveux sympathique. Le rythme cardiaque s’accélère, la tension artérielle augmente et le corps libère des catécholamines, des hormones de l’éveil et de l’alerte.
Répété chaque nuit, ce mécanisme épuise le système cardiovasculaire. L’hypoxie intermittente provoque une inflammation chronique et un stress oxydatif qui fragilisent les vaisseaux sanguins. Peu à peu, la tension artérielle se dérègle et favorise l’apparition de troubles du rythme cardiaque.
Le cerveau n’est pas épargné. L’hypoxie répétée et les micro-éveils nocturnes provoquent une neuroinflammation et altèrent certaines régions du cerveau impliquées dans la mémoire, l’attention et la régulation émotionnelle. Ces changements fonctionnels expliquent en partie la somnolence diurne, les problèmes de concentration et les difficultés cognitives fréquemment observés chez les patients souffrant d’apnée du sommeil. [2] [3] [4]
Les risques cardio-vasculaires et métaboliques associés
Côté cœur, une grande étude publiée dans l’ International Journal of Cardiology a montré que les personnes souffrant d’apnée obstructive modérée à sévère ont :
- deux fois et demie plus de risques de développer une maladie cardio-vasculaire,
- deux fois plus de risques de faire un accident vasculaire cérébral (AVC). [5]
Ces résultats s’expliquent par les réveils répétés, le manque d’oxygène et les pics de tension artérielle qui, au fil du temps, fatiguent le cœur et fragilisent les artères.
Côté métabolisme, l’hypoxie nocturne perturbe la régulation du sucre dans le sang.
Les signaux d’alerte à ne pas ignorer
Le symptôme le plus fréquent est un ronflement fort et irrégulier, souvent interrompu par des pauses respiratoires observées par le conjoint. Ces arrêts peuvent durer plusieurs secondes avant qu’une inspiration bruyante ne relance la respiration.
- Fatigue dès le matin ;
- Sensation de sommeil non reposant ;
- Somnolence excessive en journée ;
- Trous de mémoire ;
- Irritabilité ;
- Difficultés de concentration.
Si plusieurs de ces symptômes sont présents, il est important de consulter un médecin spécialiste pour un dépistage du syndrome d’apnée obstructive du sommeil.
Symptômes typiques et situations à risque
Certaines situations augmentent le risque d’apnée du sommeil :
- Surpoids ou obésité, en particulier avec un tour de cou important ;
- Consommation d’alcool ou de somnifères avant le coucher, qui relâchent les muscles de la gorge ;
- Âge supérieur à 50 ans, ou ménopause chez la femme ;
- Antécédents familiaux de ronflement ou d’apnée.
L’association de ces causes et facteurs doit encourager à surveiller les signes de somnolence et de fatigue chronique, car ils peuvent révéler un trouble respiratoire non diagnostiqué.
Quand consulter sans attendre
N’attendez pas qu’un accident survienne pour agir. Une consultation s’impose lorsque :
- Les ronflements sont quotidiens et gênants ;
- Le partenaire remarque des pauses respiratoires pendant le sommeil ;
- La fatigue persiste malgré des nuits complètes ;
- La somnolence devient dangereuse au volant ou au travail.
Comment réduire le risque de complications graves ?
Le diagnostic et les examens à réaliser
Le diagnostic de l’apnée du sommeil repose sur un bilan du sommeil, prescrit par un médecin généraliste ou un pneumologue. Il peut être réalisé de deux façons :
- La polygraphie ventilatoire nocturne, souvent effectuée à domicile : elle mesure les flux d’air, les mouvements thoraciques et la saturation en oxygène pendant la nuit.
- La polysomnographie, réalisée en centre du sommeil : c’est l’examen le plus complet. Elle enregistre également l’activité cérébrale, les mouvements oculaires et les phases de sommeil.
Les résultats permettent de calculer l’indice d’apnées-hypopnées (IAH), c’est-à-dire le nombre d’arrêts ou de ralentissements respiratoires par heure de sommeil.
Les traitements efficaces : PPC, hygiène de vie et alternatives
Le traitement de référence de l’apnée du sommeil modérée à sévère est la PPC (pression positive continue). C'est un appareil apnée du sommeil qui envoie un léger flux d’air dans les voies respiratoires via un masque, empêchant leur fermeture pendant le sommeil.
Lorsqu’elle est bien utilisée (au moins 4 heures par nuit), la PPC améliore rapidement la qualité du sommeil, la vigilance et réduit les risques cardiovasculaires. Pour les formes plus légères, d’autres traitements existent :
- Les orthèses d’avancée mandibulaire, qui maintiennent la mâchoire avancée pour libérer le passage de l’air.
- La chirurgie, en cas d’obstruction anatomique (déviation de cloison, amygdales volumineuses, etc.).
- La perte de poids, souvent déterminante : une réduction de 10 % du poids corporel peut diminuer considérablement la sévérité des apnées obstructives.
- Les mesures d’hygiène de vie : éviter l’alcool et les somnifères le soir, privilégier le sommeil sur le côté, adopter une activité physique régulière.
Enfin, un suivi médical régulier est essentiel pour ajuster le traitement et s’assurer de sa bonne efficacité.
Peut-on vivre longtemps avec une apnée du sommeil ?
Oui, il est tout à fait possible de vivre longtemps avec une apnée du sommeil, à condition qu’elle soit diagnostiquée, traitée et suivie régulièrement. Le véritable danger ne vient pas du syndrome en lui-même, mais de sa méconnaissance ou d’un traitement mal observé.
L’importance du suivi et de l’adhésion au traitement
Le suivi et la motivation du patient sont essentiels pour assurer l’efficacité du traitement dans le temps. Pour les patients souffrant d’apnées obstructives et équipés d’une PPC (pression positive continue), une utilisation régulière, au moins 4 heures par nuit, est nécessaire pour stabiliser la respiration et limiter les risques de complications.
Une PPC bien utilisée, associée à un suivi médical particulier, permet de vivre aussi longtemps et en aussi bonne santé qu’une personne sans apnée du sommeil.
Conseils pour préserver sa santé au quotidien
En complément du traitement, plusieurs habitudes de vie limiteront les symptômes et protégeront votre cœur à long terme :
- Maintenir un poids santé ;
- Bouger chaque jour ;
- Dormir sur le côté ;
- Éviter l’alcool et les somnifères avant le coucher ;
- Préserver son hygiène de sommeil ;
- Ne pas négliger le suivi médical.
En associant traitements, vigilance et hygiène de vie, on peut retrouver un sommeil réparateur et préserver durablement son cœur, son énergie et sa vitalité.
L’apnée du sommeil n’empêche pas de vivre pleinement
Détectée tôt et traitée correctement, l’apnée du sommeil ne réduit ni l’espérance de vie ni la qualité de vie. Grâce à la pression positive continue (PPC), à une hygiène de vie adaptée et à un suivi médical régulier, il est possible de retrouver des nuits paisibles, une énergie stable et une santé cardiovasculaire préservée.
Sudden death in individuals with obstructive sleep apnoea: a systematic review and meta-analysis
Obstructive sleep apnea and cardiovascular risk: meta-analysis of prospective cohort studies
Obstructive sleep apnea and risk of type 2 diabetes mellitus: A systematic review and dose-response meta-analysis of cohort studies