La colique hépatique se manifeste par une douleur intense et soudaine provoquée par la lithiase biliaire. Appelée aussi crise de vésicule, elle survient lorsqu’un calcul biliaire est suffisamment gros pour obstruer le canal biliaire et empêcher la circulation de la bile. L’objectif de cet article est de vous aider à reconnaître les symptômes de la colique hépatique, à comprendre comment la soulager et quand consulter en urgence.
Qu’est-ce qu’une colique hépatique et comment la reconnaître ?
Colique hépatique : comprendre l’origine de la douleur
Loin des troubles digestifs occasionnels, la colique hépatique surprend par son apparition brutale et l’intensité de la douleur qu’elle provoque. Elle survient généralement après un repas copieux et souvent gras.
La vésicule est la poche située sous votre foie, qui stocke la bile. Lorsqu’elle est stimulée, en particulier en postprandial, elle se contracte pour faire passer la bile et permettre la digestion des aliments. En cas de calcul biliaire, elle peut le pousser vers le canal cystique et l’obstruer temporairement, ce qui augmente la pression au sein de la vésicule et provoque la douleur. [1]
Quels sont les symptômes caractéristiques de la colique hépatique ?
Le blocage passager de la vésicule biliaire se manifeste par une douleur abdominale soudaine crampiforme localisée à l’hypochondre droit, à l’épigastre ou dans la région sous-sternale irradiant jusqu’à l’omoplate.
L’intensité douloureuse de la crise colique est plus ou moins forte selon la localisation du calcul : canal cystique ou canal cholédoque, et s’il est associé à une obstruction complète. [2]
Cette sensation de “coup de poignard” survient typiquement après un repas riche en graisse ou la nuit. Elle dure en moyenne une trentaine de minutes, voire quelques heures et s’accompagne parfois de nausées et/ou de vomissements.
La différence avec une simple indigestion, une gastrite ou une douleur intestinale
La crise de vésicule se différencie des troubles digestifs classiques à la fois par le type de douleur irradiante et par sa localisation.
La dyspepsie est un terme utilisé pour identifier une indigestion avec des symptômes tels que des sensations de lourdeur, parfois associées à des ballonnements et des brûlures d’estomac. Elle regroupe les troubles digestifs en général comme la sensation de mal digérer.
La dyspepsie fonctionnelle est sans cause organique apparente et est généralement due à un dysfonctionnement de l’estomac comme un problème de motricité ou une hypersensibilité.
La dyspepsie non fonctionnelle fait suite à des pathologies comme la gastrite, un ulcère ou un cancer.
La douleur ou la gêne ressentie est beaucoup moins intense et ne se propage pas de la même manière que lors de la colique.
En revanche, la gastrite est une inflammation de la muqueuse gastrique. Elle peut être aiguë ou chronique (longue) et concerne spécifiquement les cellules de la paroi de l’estomac. Elle peut être causée par la bactérie Helicobacter pylori, par la prise de médicaments, par l’alcool, le stress ou avoir des causes auto-immunes.
Contrairement à l’indigestion, la douleur persiste et s’intensifie en l’absence de traitement. En cas de gastrite chronique, une anémie par carence en fer et en vitamine B12 est généralement associée en raison de l’inflammation prolongée de la muqueuse digestive. Le diagnostic de cette pathologie se fait par endoscopie.
Certains symptômes sont communs à la colique hépatique, tels que les brûlures, les nausées ou vomissements, mais elle est la plupart du temps asymptomatique et ne provoque pas de douleurs intenses et irradiantes.
La douleur intestinale est un terme plus vague qui pourrait potentiellement inclure le type de douleur soudaine et intense provoquée par la colique hépatique. Cependant, elle diffère en particulier par sa localisation au niveau de l’intestin grêle et du côlon.
De plus, les douleurs intestinales peuvent avoir de multiples origines telles que le SII, les MICI, des diverticules, des polypes, ou encore des problèmes de constipation.
Que se passe-t-il dans votre corps pendant une crise ?
Vous l’avez compris, la douleur que vous ressentez est vraiment caractéristique et se différencie des autres pathologies digestives. Le processus est en réalité assez simple : c'est la réponse de votre corps à une obstruction temporaire.
Le rôle des calculs biliaires qui obstruent temporairement les canaux
Les calculs biliaires se forment lorsque la bile devient sursaturée en substances grasses : cholestérol, sels de calcium ou bilirubine, qui s’accumulent et forment des cristaux.
Ces dépôts cristallins restent souvent asymptomatiques et sont découverts fortuitement lors d’examens d’imagerie. Ils peuvent en effet rester silencieux longtemps puis migrer soudainement.
Si un calcul biliaire est suffisamment volumineux, il bloque le canal cystique ou cholédoque et empêche l’écoulement de la bile. C’est ce qui déclenche la colique hépatique accompagnée d’une douleur brutale et intense.
Pour en savoir plus sur la formation et les complications dues aux calculs biliaires, n’hésitez pas à consulter notre article sur le sujet.
Pourquoi la douleur est-elle si intense ?

La douleur provient de la distension aiguë des voies biliaires et de la contraction réflexe de la vésicule pour expulser la bile. Les terminaisons nerveuses locales transmettent un signal douloureux intense, difficilement calmé tant que l’obstacle n’est pas levé.
La crise douloureuse peut être d’intensité variable selon la localisation du calcul biliaire ou si l’obstruction est totale ou partielle. En effet, si l’accumulation de cristaux forme un gros calcul, il ne pourra pas être éliminé naturellement.
Cela peut entraîner des complications plus graves avec notamment une inflammation de la vésicule avec une infiltration bactérienne. [2]
Combien de temps dure une crise de colique hépatique ?

La douleur s’installe brutalement, reste intense et constante tant qu’il y a blocage. La vésicule étant sous pression, elle ne peut pas faire circuler la bile. Dans 50 % des cas, l’épisode douloureux se répète avec un rythme régulier en fonction de la localisation du calcul. Il peut en effet rester bloqué dans la vésicule ou migrer.
C’est ce que l’on appelle la migration lithiasique : le calcul passe dans la voie biliaire principale lorsque la vésicule se contracte. Il se retrouve alors coincé et bloque le flux biliaire. La pression augmente rapidement dans l’arbre biliaire et entraîne une douleur brutale et intense caractéristique de la colique hépatique.
En général, après quelques minutes, voire quelques heures, la pression biliaire permet d’expulser le calcul. Elle se normalise ensuite et la douleur disparaît. C’est le cas de la lithiase symptomatique sans complication, c’est-à-dire sans modification du bilan biologique hépatique. [3]
Comment soulager et calmer une crise de colique hépatique ?
La première recommandation si vous ne savez pas quoi faire en cas de crise de colique hépatique est de consulter un médecin en urgence pour confirmer le diagnostic. Le traitement de la colique hépatique repose sur une prise en charge médicale adaptée pour éviter d’éventuelles complications.
Les traitements médicaux d'urgence
Si la douleur est insupportable, la première chose à faire est dela soulager. Les antalgiques comme le paracétamol sont généralement utilisés en perfusion pour une action plus rapide et plus efficace. Le recours aux anti-inflammatoires non stéroïdiens ou à des antidouleurs plus puissants comme la morphine est parfois nécessaire.
Les antispasmodiques permettent également de détendre les muscles des voies biliaires et de réduire les spasmes.
Des médicaments comme l'acide chénodésoxycholique et l'acide ursodésoxycholique peuvent dissoudre les petits calculs biliaires de cholestérol.
Cependant, le taux de récidive est très élevé (90 à 100 % en 5-6 ans) avec ce type de traitement, ce qui le rend nécessaire à vie pour éviter le retour des calculs. [4]
Les gestes à faire à la maison en attendant un avis médical
Si vous êtes dans l’impossibilité de consulter immédiatement, il est conseillé d’adopter une position confortable, légèrement assise ou semi-allongée pour diminuer l’inconfort et réduire la pression en attendant le médecin.
Il est préférable de ne pas manger (vous n’en avez certainement pas envie), pour éviter de stimuler votre vésicule biliaire, surtout des aliments gras.
Ne pas prendre d’anti-inflammatoires ou d’automédication, notamment si une complication (fièvre, jaunisse, douleur intense persistante) apparaît.
On pense parfois faire une crise de foie. En réalité, ce terme populaire désigne une indigestion qui n'est pas causée par un problème du foie, mais plutôt par un excès de nourriture et d'alcool qui perturbe l'estomac, l'intestin et la vésicule biliaire. [5]
Cette distinction est importante car les symptômes, bien que désagréables, sont généralement bénins et passagers. Si les symptômes persistent ou s’aggravent, il est indispensable de consulter votre médecin.
Que faire après une crise pour éviter une récidive immédiate ?
Après une première crise, la probabilité d'en avoir une autre est élevée. Si votre médecin en a déterminé la cause, il vous proposera un traitement adapté ou une cholécystectomie (ablation de la vésicule biliaire) pour limiter le risque de récidive et de complications.
Pour prévenir la colique hépatique :
- Adoptez un régime alimentaire équilibré et riche en fibres.
- Réduisez les graisses et les plats épicés.
- Privilégiez une alimentation riche en nutriments.
- Consommez des fruits, des légumes et des légumineuses. [6]
Quand la colique hépatique devient-elle une urgence ?

En effet, la migration ou l’enclavement du calcul peut devenir une urgence médicale, notamment si elle engendre d’autres symptômes comme de la fièvre, un ictère ou des douleurs généralisées.
La cholécystite aiguë
C’est une infection de la vésicule due à l’obstruction prolongée du canal cystique. Ce syndrome infectieux se traduit par un état fébrile associé à une douleur localisée au niveau de l’hypochondre droit qui persiste au-delà de 24 heures.
La cholécystite est une inflammation de la vésicule biliaire qui peut survenir avec ou sans calculs biliaires. Cependant 95 % des personnes diagnostiquées avec une cholécystite aiguë présentent des calculs biliaires. Elle peut se développer suite à l’occlusion du canal cystique ou à une altération de la vidange vésiculaire.
La bile n’étant pas suffisamment drainée, cela entraîne une augmentation de la pression intraluminale et une distension, qui provoquent une ischémie et une inflammation de la paroi vésiculaire. La bile stagnante crée un environnement favorable aux bactéries.
Cette infection peut devenir potentiellement grave si elle n’est pas traitée en urgence. [7]
Lorsque les calculs migrent dans les canaux biliaires, ils causent d’autres complications comme un ictère, une infection de l’arbre biliaire ou une inflammation du pancréas.
L'angiocholite
Lorsque la bile stagne en amont du calcul biliaire bloquant la voie biliaire, elle peut provoquer une infection aiguë de l’arbre biliaire avec un ictère, des douleurs intenses et de la fièvre. Il s’agit de l’angiocholite, une urgence vitale nécessitant une hospitalisation.
Une antibiothérapie est indispensable et une désobstruction du canal biliaire suivie d’une cholécystectomie. [8]
La pancréatite
Dans le cas où le calcul biliaire obstrue l’ampoule de Vater, c’est-à-dire la jonction entre le canal cholédoque et le canal pancréatique, il peut entraîner une inflammation aiguë du pancréas : la pancréatite. Les symptômes associés sont le plus souvent de fortes douleurs abdominales et des vomissements, et peuvent aller d’un œdème léger à une nécrose du pancréas. [8]
Les causes de la pancréatite aiguë comprennent les troubles obstructifs, tels que les calculs biliaires et les boues biliaires, la consommation d'alcool, le tabagisme, la pancréatite induite par les médicaments, les troubles métaboliques, les traumatismes, les procédures médicales, les infections, les maladies vasculaires et la pancréatite auto-immune. [9]
Le traitement de la cause est important pour éviter une récidive. Une ablation de la vésicule biliaire est généralement réalisée, en particulier si la crise est due à la migration d’un calcul.
Colique hépatique : pourquoi la consultation médicale est indispensable après une première crise ?

La formation de calculs biliaires est une pathologie fréquente qui touche environ 20 % de la population occidentale. Parfois asymptomatique, seulement 1 à 4 % de personnes développent une colique hépatique chaque année. Cependant, sans traitement, 10 à 20 % des patients atteints ont un risque de complications plus ou moins graves. [1][10]
Si c’est la première fois que vous faites une crise de colique hépatique, il est indispensable de consulter un médecin pour confirmer le diagnostic et évaluer le risque de récidive.
L’examen clinique recherche un signe de “Murphy” : si la douleur provoquée par la palpation de la zone vésiculaire bloque l’inspiration forcée, cela peut être le signe de complications comme la cholécystite.
Un examen d’imagerie permettra de visualiser la présence de calculs biliaires et d’instaurer un traitement adapté ou une cholécystectomie.

Après un premier épisode de colique hépatique, le risque de crises douloureuses répétées est élevé.
Des études de cohorte avec suivi de patients présentant des calculs biliaires symptomatiques indiquent un taux d’incidence de douleurs récurrentes de 38 à 50 % par an. Ces personnes ont un risque plus élevé de complications (risque estimé à 1 à 2 %/an). [11]
Une étude a suivi pendant 24 mois 305 patients atteints de calculs biliaires mais n'ayant pas subi de chirurgie, pour observer l'évolution de leur maladie. La probabilité de ressentir à nouveau des douleurs biliaires était beaucoup plus élevée (69 %) chez les patients qui en avaient déjà eu dans l'année précédant l'étude, contre 31 % chez les autres.
La taille des calculs a augmenté chez 38 % des patients, mais a diminué spontanément chez 18 % d'entre eux. Malgré l'incidence élevée de la douleur, seulement 4 % des patients ont dû subir une cholécystectomie en urgence pour une complication au cours de ces 24 mois. [12]
Conclusion
La colique hépatique est une conséquence fréquente due à la formation de calculs biliaires. Elle est caractérisée par une douleur intense et brutale causée par l’obstruction temporaire des voies biliaires par un amas de cristaux. Ses symptômes sont caractéristiques et il est impératif de consulter pour éviter les complications, en particulier si la douleur persiste au-delà de 4 à 6 heures ou si vous avez de la fièvre. La prise en charge rapide des calculs biliaires est la meilleure façon de prévenir de futures crises et de préserver votre santé.
Crise de foie
La colique hépatique
Acute Cholecystitis
Centre Biliaire Interventionnel et Pancréatique
Acute pancreatitis: A narrative review
2016 WSES guidelines on acute calculous cholecystitis
Management of Gallstones and Their Complications
The natural history of cholelithiasis: the National Cooperative Gallstone Study